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Mutuelle HCR non respectée : quels sont les risques pour l’employeur ?

Ne pas mettre en place la mutuelle obligatoire ou ne pas respecter les règles peut exposer l’employeur à de sérieuses déconvenues. Tour d’horizon des risques juridiques et financiers encourus si vous ne respectez pas vos obligations en matière de mutuelle HCR.

Risque n°1 : Contentieux aux prud’hommes par un salarié


Le premier risque, très concret, c’est qu’un salarié (ou ex-salarié) vous poursuive en justice pour ne pas avoir bénéficié de la mutuelle à laquelle il avait droit. Les tribunaux donnent généralement raison aux employés dans ces cas :


  • Si vous n’avez pas mis en place de mutuelle du tout : chaque salarié pourrait demander des dommages et intérêts pour le préjudice subi. Même s’il n’a pas eu de dépenses de santé particulières, le simple fait d’avoir été privé d’un avantage obligatoire est considéré comme un préjudice. Les montants accordés varient, mais on a vu des tribunaux octroyer par exemple l’équivalent de la cotisation mutuelle non versée multiplié par 12 mois, ou un forfait de quelques centaines d’euros, par employé. Multiplié par le nombre d’employés, la note peut grimper vite. S’il y a eu des frais de santé non remboursés que le salarié a dû payer de sa poche alors qu’ils l’auraient été par la mutuelle, il peut en réclamer le remboursement intégral, en plus d’éventuels dommages.


  • Si la mutuelle existe mais que vous ne l’avez pas proposée à un salarié éligible (erreur d’affiliation) : Ce salarié pourrait réclamer la prise en charge rétroactive de ses frais médicaux non couverts sur la période. Par exemple, s’il a payé 300 € de lunettes alors qu’il aurait dû être affilié, on pourrait vous les réclamer. En outre, le juge peut considérer qu’il y a eu rupture d’égalité de traitement ou manquement aux obligations, et octroyer là aussi des dommages et intérêts.


  • Si vous prenez en charge moins de 50% de la cotisation ou offrez une garantie inférieure au minimum légal : un salarié pourrait vous poursuivre pour obtenir le respect du contrat légal. Par exemple, s’il a payé une part salariale de 60% au lieu de 50%, il pourrait demander le remboursement de ce surcoût. Ou si la mutuelle ne couvrait pas un poste obligatoire (disons l’optique minimum), il pourrait demander le remboursement de ce qui aurait dû être pris en charge. Ce sont des cas plus rares car en général l’erreur vient d’un oubli total ou d’un retard, plus que d’une mutuelle partielle.


En plus de la condamnation pécuniaire, un contentieux prud’homal abîme votre relation sociale et votre réputation (surtout s’il se sait que vous ne donniez pas la mutuelle obligatoire – cela peut dissuader des candidats ou entacher l’ambiance).


Risque n°2 : Redressement Urssaf


L’Urssaf veille au grain sur ces sujets. Lors d’un contrôle, si elle constate que vous n’avez pas de mutuelle collective alors que vous auriez dû en avoir une depuis telle date, elle peut opérer un redressement :


  • D’une part, l’Urssaf pourrait réintégrer dans l’assiette de cotisations l’équivalent de la contribution employeur qui aurait dû être versée. Par exemple, pas de mutuelle en 2022 pour 10 salariés, alors qu’en moyenne l’employeur aurait dû payer 30 €/mois chacun = 3 600 € sur l’année. L’Urssaf peut considérer que vous avez accordé un “avantage en espèces” à vos salariés de ce même montant (puisque vous ne l’avez pas dépensé) et vous réclamer les cotisations sociales sur ces 3 600 € (environ 45%, soit ~1 600 €) + des majorations de retard. Ce raisonnement semble tordu, mais ils l’utilisent parfois en considérant l’économie réalisée comme une base de cotisation dissimulée.


  • D’autre part, si vous avez indûment bénéficié d’exonérations sociales sur un contrat non conforme, l’Urssaf peut exiger le paiement des cotisations non prélevées. Par exemple, vous aviez un contrat mais vous payiez seulement 30% et le salarié 70%. L’exonération patronale n’était valable que jusqu’à 50%. Ils pourraient réclamer les cotisations sur la différence.


  • Si vous n’avez pas appliqué la portabilité pour un salarié partant (et que celui-ci n’a pas eu la mutuelle alors qu’il y avait droit), l’Urssaf pourrait là aussi assimiler cela à un manquement aux obligations sociales, voire vous redresser en considérant que la cotisation mutualisée prévue n’a pas été acquittée.


Ces redressements peuvent s’accumuler sur plusieurs années si le manquement est ancien. L’Urssaf peut contrôler sur les 3 dernières années en général.


Outre le paiement des sommes, c’est aussi stressant et chronophage de gérer un contrôle Urssaf conflictuel. Autant l’éviter en étant carré sur la mutuelle.


Risque n°3 : Sanctions pénales en cas de faute grave (rare)


Théoriquement, le fait de ne pas appliquer une convention collective est un délit passible de sanctions pénales (amende notamment). Dans la pratique, il est très rare qu’un employeur soit poursuivi au pénal juste pour la mutuelle non mise en place. Ce serait plutôt couplé à d’autres manquements (multiples infractions au Code du travail). Mais en théorie, l’inspection du travail pourrait dresser un procès-verbal pour non-respect de la convention collective HCR, transmis au parquet.


On en arrive rarement là : généralement, l’inspection du travail envoie d’abord une lettre d’observation ou mise en demeure de se conformer. Si malgré cela l’employeur persiste à ne pas instaurer la mutuelle, là il s’expose potentiellement à des poursuites pénales (contravention de 5e classe par salarié lésé, autant dire que ça peut chiffrer aussi).


Risque n°4 : Image et climat social dégradés


Au-delà des aspects juridiques, ne pas respecter la mutuelle obligatoire vous fait prendre un risque managérial :


  • Perte de confiance : Vos employés risquent de se sentir floués et de ne plus faire confiance à la direction. Cela peut mener à une démobilisation, voire inciter certains à quitter l’entreprise dès qu’ils le peuvent. Dans un secteur où la fidélisation est cruciale, c’est un risque important.


  • Mauvaise réputation : Les professionnels du HCR parlent entre eux. Un salarié mécontent peut raconter autour de lui (voire sur les réseaux) que “chez XYZ, ils n’ont même pas la mutuelle obligatoire, fuyez !”. Cela peut rendre vos recrutements futurs plus compliqués, surtout que la plupart des concurrents, eux, auront mis la mutuelle en place. Vous ne voulez pas être classé dans la catégorie des “mauvais employeurs”.


  • Conflit social : Un non-respect flagrant (ou même un retard) peut mobiliser les représentants du personnel ou un syndicat. Vous pourriez faire face à des revendications collectives ou des grèves sur ce motif. Autant de perturbations qui peuvent vous coûter cher en exploitation et nuire à l’ambiance de travail.


En somme, ne pas appliquer cette obligation assez basique envoie un très mauvais signal : celui que vous ne respectez pas la loi ni vos engagements envers vos salariés. C’est rarement un calcul gagnant.


Risque n°5 : Couvrir de votre poche un sinistre prévoyance


Même si la question portait sur la mutuelle, rappelons que la prévoyance HCR est aussi obligatoire. Si, faute de contrat, un drame survient (décès ou invalidité d’un salarié) et qu’aucune prévoyance n’est en place, l’employeur peut se retrouver en première ligne pour assumer ce que l’assurance aurait dû payer :


  • En cas de décès, la famille pourrait vous reprocher l’absence d’assurance et vous réclamer le montant du capital qu’elle aurait dû percevoir (par exemple en faisant valoir un préjudice pour manquement de sécurité sociale d’entreprise). Juridiquement, ce n’est pas automatique, mais humainement la pression peut être forte. Certains employeurs, par empathie ou crainte d’un procès, ont versé eux-mêmes une indemnité à la famille équivalente à ce que la prévoyance aurait donné. On peut éviter ce dilemme en ayant la prévoyance...


  • En cas d’arrêt longue durée, si pas de prévoyance pour compléter le salaire, vous serez tenu par le Code du travail de continuer le maintien légal (30 jours +30 jours) mais au-delà le salarié tombera à 50% de son salaire. Il pourrait (outre l’aspect contentieux vu plus haut) se retrouver dans une grande difficulté financière et se tourner vers vous pour chercher une solution. Vous n’aurez alors que vos yeux pour pleurer ou, là encore, faire un geste ad hoc pour l’aider (sans quoi vous risquez de voir votre salarié se détourner totalement).


Ce risque n’est pas directement une sanction juridique, mais il est bien réel financièrement et moralement.


En conclusion : régularisez au plus vite !


Si vous n’êtes pas en conformité aujourd’hui, la meilleure façon de limiter ces risques est de mettre en place la mutuelle/prévoyance sans attendre. L’Urssaf et les juges tiennent compte de la bonne foi : un employeur qui corrige son manquement spontanément a plus de chances d’éviter de lourdes sanctions (on peut négocier en cas de contrôle un redressement “allégé” si on montre qu’on a rectifié dès qu’on a su).


En revanche, persister dans l’illégalité alors qu’on sait, c’est prendre le bâton pour se faire battre.


Le coût d’une mutuelle HCR est dérisoire comparé aux risques encourus en ne la mettant pas : quelques dizaines d’euros par mois vs potentiellement des milliers d’euros de dommages et redressements plus tard. Le calcul est vite fait.


Retenez qu’au-delà de l’aspect obligatoire, c’est votre responsabilité d’employeur de protéger vos salariés. Ne pas le faire entame ce lien de confiance et peut vous coûter bien plus cher que le respect de la loi.


En somme : pas de jeu avec la mutuelle obligatoire ! Le jeu n’en vaut vraiment pas la chandelle. Si vous avez un doute sur votre conformité, faites-vous accompagner immédiatement (un courtier ou un conseiller en droit social pourra mettre en place ce qui manque). Il en va de la pérennité et de la sérénité de votre entreprise.

 
 
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